" Dieu écoute le cri des opprimés, "Lettre pastorale des évêques du Zimbabwe pour Pâques 2007, publiée à Harare, le jeudi 5 avril 2007, Source : fides.org (traduction La Croix), Sur le site du journal La Croix du jeudi 19 avril 06
Nous n'en reproduisons qu'un extrait
[…] Les racines de la crise
La présente crise de notre pays a ses racines profondes dans son passé colonial. Malgré la rhétorique de la glorieuse révolution socialiste obtenue par le combat armé, les structures et institutions coloniales du Zimbabwe pré-indépendant continuent de persister dans notre société. Aucune des lois injustes et oppressives de l’Etat rhodésien sur la sécurité n’a été annulée ; en réalité, elles ont été renforcées par une législation toujours plus répressive, le Public Order and Security Act et l’Access to Information and Protection of Privacy Act, en particulier. C’est comme si quelqu’un s’asseyait sur la Déclaration des droits de l’homme et arrachait chacune de ses pages délibérément.
Pourquoi tout cela ? Parce que très vite après l’indépendance, le pouvoir et la richesse de la petite élite blanche rhodésienne ont été récupérés par une élite noire tout aussi exclusive, dont certains membres gouvernent le pays depuis 27 ans, à travers un clientélisme politique.
Les Zimbabwéens se battent aujourd’hui pour les mêmes droits basiques pour lesquels ils ont combattu dans leur lutte pour la libération. Le conflit est le même, opposant ceux qui possèdent le pouvoir et la richesse en abondance et ceux qui en sont privés ; ceux qui sont déterminés à maintenir leurs privilèges de pouvoir et de richesse à tout prix, quitte à faire couler le sang, et ceux qui demandent des droits démocratiques ainsi que le partage des fruits de l’indépendance ; ceux qui continuent de bénéficier du présent système d’inégalité et d’injustice, parce qu’il les favorise et leur permet de se maintenir à un niveau de vie exceptionnellement haut, et ceux qui se couchent affamés la nuit et se réveillent le matin suivant sans travail et sans revenu ; ceux qui ne connaissent que le langage de la violence et de l’intimidation et ceux qui sentent qu’il n’ont plus rien à perdre parce que leurs droits constitutionnels ont été abrogés et leurs votes méprisés.
Beaucoup de gens au Zimbabwe sont en colère, et leur colère éclate maintenant dans la révolte, dans les banlieues, les unes après les autres. La confrontation dans le pays a atteint maintenant un point de non retour. Alors que les souffrances de la population deviennent de plus en plus évidentes, engendrant de plus en plus de pression à travers les boycotts, grèves, manifestations et soulèvements, l'Etat répond par une oppression toujours plus dure, par des arrestations, détentions, bannissements, tabassages et tortures. Selon nous, la situation est extrêmement volatile. Pour éviter un nouveau bain de sang et un soulèvement massif, la nation a besoin d'une nouvelle constitution issue du peuple qui guidera un leadership démocratique, choisi lors d'élections libres et équitables, qui donneront sa chance à un renouveau économique et une politique authentiquement nouvelle.
Notre message d’espoir : Dieu est toujours du côté des opprimés [...]
Lettre signée par Robert C. Ndlovu, archevêque de Harare (ZCBC, président), Pius Alec M. Ncube, archevêque de Bulawayo, Alexio Churu Muchabaiwa, évêque de Mutare (ZCBC, secrétaire/trésorier), Michael D. Bhasera, évêque de Masvingo, Angel Floro, évêque de Gokwe (ZCBC Vice-président), Martin Munyanyi, évêque de Gweru, Dieter B. Scholz SJ, évêque de Chinhoyi, Albert Serrano, évêque de Hwange, Patrick M. Mutume, évêque auxiliaire de Mutare.
vitrail de l'église remonstrante d'Arnheim (Pays-Bas). La Remonstrant Brotherhood est ainsi dénommée suite aux "remontrances" qu'elle fit au XVIème siècle au pouvoir religieux calviniste.
Au Bénin, puis dans d'autres pays africains, au Togo, Zaïre, etc., de semblables lettres pastorales ont conduit à la mise en place d'une Conférence nationale et à la sortie des régimes à parti unique et à tendance autoritaire. Dans bien des pays d'Afrique, l'Eglise catholique a été finalement la seule institution capable d'élever la voix et de tirer l'oreille des nantis et des dictateurs.