C’est vrai que le Conseil français du culte musulman (CFCM), l'instance officielle mise en place en 2003 par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, ne brille guère par ses déclarations ! Alors que les Français souscrivent très volontiers aux propos de Dalil Boubakeur, recteur de la Mosquée de Paris et des imams de plusieurs autres grandes villes comme Marseille, Bordeaux, etc..
Pourquoi un tel décalage ? Dans un ouvrage publié début 2005, chez Calmann-Lévy, la politologue Fiammetta Venner, dénonçait déjà, en titre de son livre L’OPA sur l’islam de France par l'Union des organisations islamiques de France (UOIF). Interviewée par Jacqueline Remy et Boris Thiolay de l’Express en février 2005, on en apprend de vertes et de pas mûres. Cet interview, intitulé "La face cachée de l’UOIF" a été reproduit sur le site ProChoixNews du lundi 2 mai 2005
L'UOIF a été créée en 1983 par des émules de deux formations islamistes. D'un côté, des fans de Rachid Ghannouchi, créateur du groupe islamiste tunisien Ennadha et disciple des Frères musulmans (expulsé de son pays et interdit de séjour en France, il s'est réfugié en Angleterre en 1991). De l'autre, des admirateurs de Fayçal Mawlawi, un Frère musulman libanais qui a vécu en France, a participé à la fondation de l'Association des étudiants islamiques de France (AEIF) et est aujourd'hui responsable de Jamaat Islamiyya, une organisation terroriste au Liban. Au début de ces années 1980, ce n’était qu’un petit cercle d'étudiants et d'activistes islamistes en exil.
Mais depuis 2003, date de la mise en place du CFCM par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, cette fédération d'associations est devenue un interlocuteur privilégié de l'Etat français pour la gestion de l'islam en France. Largement financée par des fonds du Moyen-Orient, l’UOIF achète en effet des mètres carrées de locaux, multipliant partout des mosquées de proximité, ce qui lui donne le droit d’être super représentée au sein du CFCM, laquelle pour ses élections se base précisément sur la superficie des mosquées. CQFD !
Or l’UOIF est une filiale de l'Union des organisations islamiques en Europe, basée à Londres, laquelle diffuse la doctrine officielle des Frères musulmans, organisation parfaitement intégriste qui vise à l’instauration de la charia (les premières brochures de l'UOIF traduites en français provenaient de la Leicester Foundation), et qui a une main mise totale sur le Conseil européen de la fatwa, une instance religieuse.
Le 28 juillet 2003, à Stockholm, cette instance religieuse a défrayé la chronique en justifiant les attentats suicide : il ne fallait plus appeler ces actions des "attentats suicides" mais des "gestes de martyrs", parce que les "fils de Sion" - s'agit-il des Israéliens ou de tous les juifs ? - sont tous (civils ou pas) "des soldats". Jusqu’à présent, elle est la seule instance religieuse du monde arabe a avoir été aussi loin.
L’UOIF est bien organisée, très actives sur les campus universitaires et lors des Ramadan ; elle organise chaque année un grand un meeting au Bourget ; elle finance et soutient le Comité de bienfaisance et de secours aux Palestiniens (CBSP), qui récolte des fonds pour le Hamas, organisation armée palestinienne inspirée par la doctrine des Frères musulmans. Elle se présente (comme Tarik Ramadan qui lui est proche) comme "moderniste", mais au sens de l’utilisation des formes modernes de communication : parler en français, utiliser les moyens modernes de communication, des technologies, aller à l’école (et y imposer le voile islamique – l’UOIF finance des avocats pour défendre les jeunes filles musulmanes victimes de notre système scolaire !), faire du prosélytisme et convertir la vieille Europe, terre de mission (mais les chrétiens n’ont rien à dire, eux qui ont envoyé des missionnaires partout dans le monde, avec des méthodes parfois / souvent rudes pour les autochtones "païens" !), avoir une stratégie mondialiste.
Ceci dit, même si l’UOIF avance masqué, ses agissements et les propos de ses fondateurs et militants, à l’heure de l’Internet, sont bien connus (à moins de jouer aux autruches) *. Pour Jaballah, cofondateur de l’UOIF : "L'UOIF est une fusée à deux étages. Le premier étage est démocratique, le second mettra en orbite une société islamique". Au moins, on ne trompe pas le client avisé sur la marchandise !
* propos et opuscules anti-sémites, prises de position contre la laïcité, la mixité dans les écoles, le droit à l’avortement, etc., pour le port du voile à l’école, le communautarisme chaque fois que nos braves démocraties l’acceptent, etc. Plus réac, je meurs !
Grâce au CFCM et l’entrisme de l’UOIF en son sein, la France est-elle devenue une base arrière de l’islamisme en Europe ?
Nonobstant ses prétentions exorbitantes : dire ce que tout bon musulman doit faire dans une vision tout à fait étriquée et passéiste de l’islam, cette mouvance compte surtout des militants et fort peu de théologiens. Pourtant, l’UOIF a un institut de formation des imams, dirigé par Youssef al-Qaradhawi, mentor des Frères musulmans, chef du Conseil européen de la fatwa, prédicateur télé sur la chaîne Al-Jazira, à la tête d'une fortune colossale et conseiller religieux de la plupart des grandes banques islamiques dans le monde (il a fait sa thèse théologique sur la zakat, l’aumône légal en islam, afin de la rendre compatible avec le système bancaire "islamique").
Les barbus salafistes sont en concurrence violente avec les Frères musulmans : querelle interne pour la bonne guidance de l’intégrisme musulman. Eh oui ! on se bouscule pour surfer sur la vague ! Ils sont aussi en concurrence, lors des élections, avec les musulmans de France qui sont nombreux à continuer à se référer à leurs pays d’origine respectifs dans le cadre de leurs propres fédérations (les musulmans marocains, algériens, turcs, et réunionnais), soit le maintien d’une logique nationale à l’encontre des grands mouvements islamistes (des Frères musulmans, des wahabites, des salafistes, etc.)
... mais jusqu’à quand à l'heure de la mondialisation ?