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1 juin 2010 2 01 /06 /juin /2010 16:42

suite et fin de l'article précédant

 

En fait, le néo-protestantisme désigne AUSSI, mais pour d’autres auteurs, les nouvelles Eglises apparues aux Etats Unis et qui ne se revendiquent pas comme issues des Réformes européennes du XVIème siècle.


Sont issues de la Réforme : les Eglises luthériennes, les Eglises calvinistes / congrégationalistes (aux Etats-Unis) / Réformées (en France et pays voisins), les Mennonites (ayant hérités des anabaptistes), sans oublier les Eglises unitariennes de langue hongroise (héritières d’une autre Réforme radicale : l’anti-trinitaire). S’y sont ajoutées des Eglises catholiques qui se sont ralliées à la Réforme : les vaudois (qui étaient sous le coup de l’Inquisition), les anglicans / épiscopaliens américains, avec le rejeton méthodiste, les hussites en Tchécoslovaquie, etc.


Mais, aux Etats-Unis au XIXème siècle, d’autres Eglises sont apparues sans aucune filiation avec les Réformes européennes du XVIème siècle et dont les liens avec le protestantisme sont à géométrie variable. Les adventistes se disent volontiers protestants et participent aux fédérations nationales mises en place, mais les quakers, les mormons, les témoins de Jéhovah ne fréquentent pas les autres protestants et font bande à part. Les unitariens anglo-saxons et les unitariens-universalistes, héritiers du protestantisme anti-trinitaire, sont carrément sortis du giron protestant. Qu’en est-il des Eglises pentecôtistes et des chrétiens évangéliques du début du XXème siècle ?

Le dimanche 19 février 1999, le pasteur Pierre Bailleux, de l’Eglise réformée de l’Alliance (située à Braine l’Alleux, en banlieue Sud-Est de Bruxelles), adressa une lettre ouverte à l’Eglise protestante unie de Belgique (EPUB) dont son Eglise est membre et qui s’apprêtait à intégrer les Eglises évangéliques fondamentalistes en son sein ; exactement ce que souhaite aujourd’hui, ardemment, la Fédération protestante française (FPF). Sont cosignataires les membres du Consistoire et du Conseil d'administration de l'Église réformée de l’Alliance. Il y conteste très vigoureusement un tel élargissement au nom de l'identité protestante (lien ).

 

Ses arguments : une lecture encore littéraliste et naïve de la Bible aux antipodes de l’exégèse scientifique, l’affirmation de détenir une Vérité absolue à partir de la même Bible, traînant avec eux le créationnisme comme un boulet depuis le récit de la Genèse, une théologie éculée faisant croire aux châtiments divins chaque fois qu’il y a une catastrophe (le sida, etc.), la discrimination de la femme dans la gestion des communautés chrétienne, la réprobation sans l’ombre d’un doute l’homosexualité, sans ouverture aux autres religions, etc. La liste des griefs est longue !

Que de différences d’avec le protestantisme d’aujourd’hui qui, depuis longtemps, a largué Calvin aux oubliettes. Olivier Abel a bien été le seul à parler d'une soi disante « modernité » de Calvin en cette année du 500ème anniversaire de sa naissance où les Réformés ont voulu faire un effort de mémoire (voir son livre paru à Paris aux éditions Pymalion, en 2009). Mal leur en a pris d’ailleurs, car la pieuse commémoration a viré à l’éloge de Michel Servet (brûlé martyr à Genève en 1553) et de Sébastien Castellion (qui dût s’exiler à Bâle en 1544) ! Merci à Calvin, sinistre dictateur théologique, qui sert manifestement de repoussoir, sinon d’épouvantail à tous les chrétiens libéraux d’aujourd’hui (nonobstant ses qualités d’organisateur efficace, sa grande aisance dans le maniement de la langue française, la clarté de ses argumentaires, et sa connaissance de l’hébreux et de l’Ancien testament dont il ressortit tous les préceptes !).

olivier-abel-yod-2009-s.jpgCertes, des communautés de la nouvelle mouvance pentecôtiste - évangéliques n’en sont plus là et ont su évoluer, se faire plus tolérantes, mais le gros du bataillon reste dogmatique et conservateur. Avec un tel grand écart, peut-il y avoir travail en commun, voir même osmose ? Le vœux d’Olivier Abel semble fort pieux :


« De ces vieilles souches [protestantes européennes] pourraient alors surgir de frais rameaux et une résistance inattendue - alors que certains néo-protestantismes sont parfois comme des fleurs coupées, à l’efflorescence impressionnante mais qui s’étiolent bien vite. Afin de réussir cette greffe, cependant, il faudrait trouver un bon rythme entre ce vétéro-protestantisme et ce néo-protestantisme. » (
"Les cultures et le différend, Un rythme protestant ?", Réforme, n°3196 du 26 octobre 2009)


Le vœux semble d’autant plus pieux, que ces « néo-protestants » surfent sur leur succès et s’ennuient fermes avec un protestantisme qu'ils jugent essoufflé, où ils ne sentent pas les fortes manifestations de l’Esprit-Saint auxquelles, eux, sont habitués (le parler en langue, l’ondoiement, les guérisons miraculeuses, les alléluias à tout bout de champs, etc.), d’où la création récente d’un Conseil national évangélique français (CNEF) où ils ont manifestement le plaisir d’être ensemble et qui met à mal le projet de la Fédération de les racoler. Aux derniers débats, certains voulaient quand même rester au sein de la Fédération, pendant que d’autres n’y étaient pas du tout intéressés.


Faut-il forcer les choses, vouloir élargir les Fédérations, en faire des attrape tout ? où bien se contenter de mouvances religieuses cohérentes où la gestion des diversités n’empêche pas le travail, les échanges, la fraternité (voir notre définition des mouvances religieuses, lien) ?


Et si Pierre Bailleux (1942-2008) * avait raison ?

* pour en savoir plus sur Pierre Bailleux, voir la rubrique à son nom dans La Besace des unitariens.

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