Les récentes révoltes populaires dans les pays arabophones sont faites au nom de la liberté et de la démocratie, mais les grandes absentes ont été la liberté de culte et le statut des minorités ethniques et / ou religieuses. Il faut dire que ces révoltes ont été déclenchées sur un fond de crise économique mondiale et à l’initiative des éléments modernistes qui se sont individualisés grâce à leurs études scolaires et l’accès à l’Internet. Pour cette élite, les identités communautaires ne sont nullement prises en considération. Ils se réfèrent au « peuple » comme si celui-ci était homogène, composé seulement d’individus, sans minorités ethniques et religieuses ; voile pudique jeté sur une société islamique, peu développée, où la religion musulmane est majoritaire et officielle. Avec 10% de la population totale, les coptes ne sont représentés au parlement que par 3 députés.
A aucun moment, ces révoltes n’ont parlé de laïcité ; celle-ci posant les questions, assurément gênantes en pays qui prône une religion officielle, de la relation entre l’Etat et les diverses religions et de la cohabitation de celles-ci entre elles. La même occultation vaut d'ailleurs aussi pour des catégories sociales nettement discriminées dans la société civile, telles les femmes et les homosexuels. « Tout le monde » baigne dans l’anonymat de la citoyenneté et des Droits de l’Homme ; et les observateurs internationaux, complaisants et démagogues face à l'irruption de nouveaux acteurs du jeu politique qu'ils n'avaient pas prévus, sont volontairement dupes de ces discours généraux et universels dès lors qu’ils s’accompagnent de manifestations populaires dans les rues et places publiques qui donnent l'impression d'une volonté unanime.
Signes que, cependant, rien n’a vraiment bougé à ce niveau en Egypte : la nouvelle Constitution a été rapidement rédigée sans participation d'aucune juriste femme et sous la houlette d’un président charismatique … et Frère musulman ; elle fut votée au suffrage universel avec célérité et avec les encouragements des Frères musulmans ; puis, dans la foulée de ce premier succès, ceux-ci ont lancé un nouveau parti politique qui se garde bien de porter leur dénomination, se présente hypocritement comme « indépendant », bien qu’entièrement piloté par eux et affirmant la non séparation du politique et de la religion !
Il n’est donc pas étonnant que les pogroms anti-chrétiens continuent, d’autant plus que ces pays se trouvent désormais dépourvus de régimes forts. En Irak et en Syrie, les chrétiens se sont sentis un temps protégés par un parti unique laïc et par des chefs d’Etats dotés de larges pouvoirs. En Egypte, avec la chute du raïs, la porte est largement ouverte aux activistes islamiques pour attaquer les communautés chrétiennes. Les salafistes et autres djihadistes multiplient les exactions. Toutes les occasions sont bonnes pour cela, à partir de conflits locaux et aussi – et surtout – de rumeurs les plus fantaisistes (comme par exemple « l’enlèvement de femmes musulmanes par des moines coptes »). L’armée, la police et la Justice, exclusivement composées de musulmans, puisque les coptes n'y sont recrutés, interviennent toujours en ménageant leurs coreligionnaires .
Les pays occidentaux devront composer prochainement avec une Egypte, toujours incontournable sur l’échiquier politique international, cette fois-ci dominée « démocratiquement », à la suite d’élections légales, par les Frères musulmans et agitée par des salafistes qui feront sans cesse de la surenchère… Sans nul doute, cette nouvelle donne nationale se fera plus que jamais sur le dos des coptes, lesquels seront toujours facilement pris comme boucs émissaires.
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