Vois les coquelicots de nos landes cathares
Longtemps après les cendres humaines des bûchers cathares
Seuls les coquelicots ont repoussé, car leur couleur sont de sang.
Longtemps après les paroles du dernier prêcheur occitan,
Le vent des landes murmure encore la vie parfaite
De ceux qui furent des bons hommes et des bonnes femmes
Ils voulurent à la fois mener vie laïque et sainte
En restant au village, cultivateurs et artisans,
Dans des maisons à toute autre pareil.
A Montségur se réfugièrent protégés par un seigneur
Mais la croisade vint les y brûler par nuit de Noël
Désormais, pour son salut, l’âme humaine devra quitter famille,
Aller au séminaire, entrer dans les ordres grégoriens,
Renoncer au mariage, mais, hypocrite, non point aux plaisirs de chair !
Obéir à un pape lointain, l’Anté-Christ de Rome,
Qui désigna les hérétiques et les fit massacrer
La Bête immonde de l’Apocalypse,
Qui est le visage de tous les empires cruels
De toutes les croisades fanatiques
De tous les intégrismes religieux
De tous les totalitarismes qui imposent leur uniformité.
Elle avait, la Bête, des habits en noir et blanc.
Prêcheurs de saint Dominique devenus bourreaux ;
Passant de village en village pour confession et délation.
Elle avait, la Bête, le bruit du galop des chevaliers venus du Nord
Pour prendre, sans vergogne, les maisons et les terres
Oui le vent des landes murmure encore la vie parfaite.
Si tu passes par là, prêtes y l’oreille car l’Histoire réveille ses morts
Les étendards se lèvent d’une armée de fantômes
Qui sort de l’ombre comme on sort à la lisière d’un bois
Après tant d’années refuge, tant de siècles d’oubli.
Les coquelicots des terres cathares
Sont pour nous présages d’espoir, tâches revivancielles,
Espérance d’un renouveau chrétien loin de Rome,
D’un christianisme libéré, multicentré en autant d’Eglises locales
Qui savent si bien épouser la terre patrimoniale.
Poème de Jean-Claude Barbier, le dimanche 20 juin 2010
« Je vais te dire la raison pour laquelle on nous appelle les hérétiques : c’est que ce monde nous hait. Et il n’est pas étonnant que ce monde nous haïsse (1 Jean 3.13), car il a haï avant nous Notre Seigneur, qu’il a persécuté ainsi que ses apôtres … C’est qu’il y a deux Eglises : l’une fuit et pardonne, l’autre possède et écorche » (Bon homme Pèire Autier, début 14è siècle)
Ce poème a été inspiré par le visionnement de deux films réalisés par France 3 Sud avec la contribution d'Anne Brenon, Jean-Louis Gasc, Pilar Jimenez, et Gwendoline Hanke (vidéo 1, vidéo 2).