À l'ombre de la Bible. Scènes de vie ; aux éditions Golias, janvier 2014
Michel Théron, agnostique de culture chrétienne, nous propose une utilisation toute littéraire de la Bible. Rappelons que « Bible » ne veut pas du tout dire révélation ou parole de Dieu, mais tout simplement une bibliothèque : imaginez donc un meuble avec plusieurs rayonnages pour y placer des livres ou encore la bibliothèque municipale de la ville où vous habitez. L’intérêt de cette bibliothèque est que les auteurs des livres, connus ou inconnus, réels où pseudonymes, parfois plusieurs pour un même ouvrage, etc., ont partagé le long d'une longue chaîne de générations une même culture historique et religieuse, une même tradition, une même foi, si bien que les plus récents se font l’échos des plus anciens. De là l’inséparabilité, contrairement à ce que proposait Marcion au IIème siècle par anti-judaïsme, entre sa partie hébraïque et juive (l’Ancien ou le Premier testament), d’une part, et sa partie chrétienne (le Nouveau testament), d’autre part. Par exemple, on ne peut pas comprendre Jésus si on le coupe de ses racines juives comme on l’a fait pendant trop longtemps.
De même, nous dit Michel Théron, le lecteur de ces livres en imprègne tout son être et c’est d’une façon toute spontanée que, déambulant dans sa quotidienneté, son regard croise sans cesse sa mémoire et que cela évoque pour lui des scènes bibliques. Dès lors, notre vie est placée à "l’ombre de la Bible".
Pourrait-on vivre sans culture ? A défaut des cultures livresques, il y a celles des champs, des fermes, des ateliers d’artisans, des usines, des mines, de la rue vagabonde, des gangs de jeunes, de l’Internet, des vidéos, etc. Mais voilà que pour Michel Théron, et avec lui toute une génération de juifs et de chrétiens (on pourrait y ajouter de musulmans car le Coran régurgite à sa façon la Bible), c’est la Bible qui joue le rôle d’héritage, de patrimoine culturel, de référence libre et acceptée, de nourriture de sens, car nous ne sommes plus ici dans une lecture dogmatique mais tout simplement culturelle.
Foin donc des prétentions religieuses qui font de la Bible une « parole » de Dieu lui-même comme si Dieu avait besoin d’un porte voix ou encore de prophètes perroquets. Un prophète est certes inspiré, mais il l’est par sa propre foi et ses convictions personnelles et il n’engage que lui-même. De même, nous dit l’auteur, le lecteur « s’inspire » de cette mémoire biblique qu’il a emmagasiné en lui et qu’il va utiliser à sa guise sans pour cela prétendre parler au nom de Dieu. Nous sommes donc ici aux antipodes du fondamentalisme qui considère, quant à lui, que ce sont là des textes directement inspirés d’en haut.
Pour en savoir plus, voir sur le blog personnel de l’auteur (lien) et ne pas oublier de cliquer sur l’interview qu’il a donné à son éditeur. Nos lecteurs trouveront dans notre même rubrique "le temps des évangiles" (lien) des présentations d’autres livres de l’auteur ; ou encore faire « Michel Théron » au niveau de la recherche d’articles (colonne latérale à « Rechercher »).